Il fait beaucoup parler de lui ces temps-ci. Mais si les idées et le
parcours d’Alain Soral ont été largement disséqués, il n’en va pas de
même de sa façon de mener ses affaires. Le fondateur et président
d’Égalité et Réconciliation est pourtant à la tête de Culture pour Tous,
entreprise lucrative chapeautant quatre sites de vente en ligne.
Derrière la politique : l’épicerie.
Esquisse d’une méthodologie
Il y a au moins trois façons de traiter du cas Soral. La première est
historique autant que politique – elle impose de se pencher sur ses
écrits ou déclarations, et de les étudier au prisme de l’histoire de
l’extrême-droite et de celle des idées politiques. En somme,
rationaliser le corpus des interventions du leader d’Égalité et
Réconciliation (E&R). Avec pour objectif d’en dégager la
substantifique moelle et de comprendre ce que celle-ci dit de l’époque.
Un travail indispensable1
pour mieux cerner le positionnement idéologique de ce personnage
complotiste, antisémite, révisionniste et nationaliste. Et pour saisir
toute la singularité de cette ultra-droite qui déteste tellement les
Juifs qu’elle se contraint – effort violent – à draguer les Musulmans.
Mais cette méthode porte en elle-même son propre risque, celui de fournir au provocateur ce qu’il attend, de l’exposition et de la légitimité politique. Et de donner à la microscopique association E&R (quelques dizaines de militants) une importance disproportionnée.
Mais cette méthode porte en elle-même son propre risque, celui de fournir au provocateur ce qu’il attend, de l’exposition et de la légitimité politique. Et de donner à la microscopique association E&R (quelques dizaines de militants) une importance disproportionnée.
Il existe une deuxième façon de procéder : se plonger dans les vidéos
que met très régulièrement en ligne Alain Soral et analyser sa
stratégie de communication. La forme plutôt que le fond, donc. Pas si
anecdotique : depuis deux ans, ces enregistrements connaissent un succès
certain sur le net2.
Auréolé de l’audace de l’infréquentable qui se revendique comme tel,
Soral peut se vanter d’une belle audience, fruit de ses perpétuelles
provocations et injures. C’est la religion du buzz appliquée à
l’extrême-droite. « Il a su se saisir des possibilités offertes par Internet et les nouveaux réseaux sociaux, constate l’un des auteurs de La galaxie Dieudonné3, Michel Briganti. C’est
d’ailleurs le cas pour une bonne part de l’extrême-droite, beaucoup
plus à l’aise que la gauche avec la communication sur le net. Elle a su
systématiser son rapport à celle-ci, elle l’a même théorisé. »
Dans ces vidéos (parfois fleuves), Alain Soral, face caméra et filmé à
domicile, rebondit sur l’actualité immédiate. Le scénario est
immuable : il digresse beaucoup ; multiplie les rodomontades et les
apartés « tiroirs » ; enchaîne allusions expéditives, raccourcis
mensongers et assertions infondées4 ;
avant – apothéose – de monter dans les tours, comme enflammé par sa
propre voix, étourdi par sa dialectique erratique. Le spectateur en
ressort avec l’étrange impression d’avoir assisté à une séance
d’onanisme public destinée à flatter un égo démesuré.
Il arrive que l’égo déborde. Littéralement : « Moi, E&R, c’est
trois à quatre heures de travail par jour. Produire ce que je suis en
train de produire là, y compris les risques, c’est des milliers d’heures
de lecture, c’est un cerveau qui représente en terme de valeur ajoutée
beaucoup, beaucoup d’argent, c’est des années et des années de lecture,
d’analyse, de combat, de prises de risques, etc... Tout ça, ça vaut
cher. Mais évidemment, nous ne sommes pas dans le monde du commerce,
donc nous n’avons pas l’obscénité de vous dire combien ça vaut, combien
ça vaut normalement de consommer une vidéo de Soral comme la mienne
[...] en terme de valeur pédagogique. »5 Ah bon, nous ne sommes pas dans le « monde du commerce » ? Vraiment ? Et si c’était l’inverse ?
LIRE LA SUITE SUR ARTICLE 11 : http://www.article11.info/?Alain-Soral-petit-ideologue-et#pagination_page
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