Le club lyonnais est
dans la tourmente depuis quelques semaines, et pas seulement sur le plan
sportif. En février, il a en effet été placé sous surveillance par la
Direction Nationale de Lutte Contre le Hooliganisme, avec quatre autres
clubs (Saint-Etienne, Nice, Montpellier et Bordeaux). L’OL est mis en
cause pour la recrudescence d’incidents à caractère racistes,
antisémites et homophobes venant de ses supporters. Les dirigeants
seront convoqués sous peu à une réunion au Ministère de l’Intérieur. En
février 2011, souhaitant jouer la carte de la respectabilité,
l’Olympique Lyonnais avait pourtant signé avec la LICRA une charte dans
laquelle il s’engageait à lutter contre toutes les formes de
discrimination.
Mais l’hypocrisie des instances dirigeantes du club olympien et le strabisme des journalistes sur cette question présentent les incidents comme des faits individuels ou d’une minorité incontrôlée. C’est vite oublier que c’est toute une ambiance, un contexte de tribune et un état d’esprit singulier qui favorisent ces « dérapages ». Et si la proximité entre certains supporters, ou groupes de supporters, et les milieux nationalistes a toujours existé, à Lyon comme dans d’autres villes, s’affichant parfois même sans complexe, elle prend une dimension particulière dans un contexte local de radicalisation d’une partie de l’extrême-droite.
Cet article (non
exhaustif !) propose de montrer les jeux de vases communiquants
existant entre tribunes de Gerland et groupuscules
nationalistes locaux. Il n’a pas pour but de mettre à l’index ou
d’accompagner la répression que peuvent connaître les ultras ou
les hooligans. Nous ne sommes pas de ceux qui veulent que Gerland
ressemble au Parc des Princes, c’est à dire un stade « mort » car sans ambiance.
Il a surtout pour vocation de mettre face à leurs contradictions
les différents acteurs de l’Olympique Lyonnais, des groupes de
supporters aux dirigeants du club.
Après une brève présentation de la culture du stade, plus précisément celle des supporters des tribunes populaires, on fera donc un inventaire des groupes de supporters lyonnais les plus importants, du plus ancien groupe au plus récent, en montrant leurs relations ou non avec les milieux nationalistes et leurs idées, ainsi que leur évolution. Afin qu’au-delà des amalgames et des préjugés souvent colportés au sujet des supporters lyonnais, devant une réalité changeante et variée, la critique, plus précise, se fasse plus incisive.
Sommaire :
Introduction : cultures de tribune : « ultras » et « hooligans »
Kop Virage Nord et Bad Gones 87
Lugdunum’s 93 (1993-2007, virage sud)
Nucleo Ultra (2000-2007, virage sud)
Cosa Nostra Lyon (2007-2010, virage sud)
Lyon 1950 (2010, virage sud)
Supporters indépendants et Hooligans
Rubrique des méfaits divers
mise à jour 16/03/2012 : À lire sur le même sujet sur Rue89 : Retour du racisme dans les tribunes de foot : le cas de Lyon.
mise à jour 23/03/2012 : pour le dernier épisode en date, lire : OL : derrière les supporters nazis, les identitaires de ’Rebeyne’
La mentalité dite « latine » désigne ce que l’on appelle les « ultras ». Elle est née en Italie à la fin des années 60. Les ultras sont des supporters qui choisissent d’encourager leur équipe en se regroupant sous forme d’associations. Ils se trouvent le plus souvent dans les virages des stades (les tribunes situées derrière les buts) traditionnellement désignés comme les tribunes populaires (le prix d’une place y est généralement inférieur aux places des tribunes latérales). Leur soutien est actif, axé autour de l’animation des tribunes, et de la défense symbolique ou non, de celles-ci face aux supporters adverses. Les ultras animent leurs tribunes dans le but d’en faire un spectacle, qu’on appelle un « tifo » [2] : Ils utilisent pour cela des « calicos » [3], drapeaux et tout un tas d’artifices dont des fumigènes (qui sont interdits et qui entraînent régulièrement répression policière et judiciaire).
Les ultras mettent un point d’honneur à prouver leur fidélité, en ne manquant aucun déplacement, en chantant et soutenant leur équipe même quand elle perd (et tant qu’ils jugent qu’elle fait preuve des même valeur qu’eux : de courage et de volonté), les supporters prouvent qu’ils sont des ultras, des fanatiques, des irréductibles... C’est ce qui les différencie des supporters classiques, partant avant la fin du match préférant éviter 30 min de bouchons que de suivre leur équipe jusqu’au bout.
Tous les « supportérismes » n’ont d’ailleurs pas le même impact. Le public assis sagement à Lyon dans les tribunes de Jean-Jaurès et de Jean Bouin (venu consommer un spectacle plus que supporter une équipe, d’une certaine manière) n’a pas le même profil que celui que l’on retrouve dans les virages nord et sud. Il n’a pas le même engagement vis à vis du club et de l’équipe. Pas la même passion, ni la même ferveur. Pour les ultras, supporter une équipe est un engament, comme une forme de militantisme.
La mentalité « anglaise » repose avant tout sur les chants tout du long de la rencontre, et va de paire avec une volonté de prendre le dessus sur les supporters adverses, y compris physiquement quand le contexte le permet. Ces supporters sont des « fans ». Ils sont parfois eux aussi regroupés en associations de supporters. Cette mentalité de « fans » désigne également les supporters dits « indépendants ». Ces supporters n’appartiennent à aucun groupe officiel, ils ne sont pas « cartés ». On appelle les plus « durs » d’entre eux les hooligans.
Pour les hooligans il y a deux championnats : celui des équipes de football et le leur, par affrontements entre groupes de supporters. Dans une société où la violence est bannie, et celle de l’état et de ses forces de l’ordre la seule qui soit considérée comme légitime, les affrontements entre supporters sont vus comme une dégénérescence du sport moderne. Pour autant, ces affrontements répondent à des règles, et malgré les accidents qui peuvent arriver parfois le but des combattants n’est pas de « tuer » l’adversaire, mais tout simplement de prendre le dessus et de le contraindre à la fuite.
La pacification à l’intérieur des stades et en dehors ainsi que la répression du mouvement ultra les conduisent à organiser et prévoir leurs affrontements. Les rendez-vous se prennent de leader à leader, pour convenir d’un endroit, d’une heure et du nombre de participants de chaque côté. Chose marquante, une règle prévaut pour tous : pas d’armes. Règle semble-t-il peu respectée par les niçois ou montpelliérains par exemple, ce qui leur vaut une haine partagée à peu près par tous les supporters d’hexagone. Les hooligans, les vrais, s’affrontent entre eux, et ne s’en prennent pas au premier porteur d’écharpe adverse venu. La plupart du temps les affrontements se déroulent dans les jours qui précèdent ou suivent le match. Mais une nouvelle mode, venue d’Europe de l’Est, pousse certains hooligans à organiser des « tapes » à 40 contre 40 perdus au font d’un bois, en dehors de toute confrontation footballistique. Chaque groupe se reconnaissant par des tenues de couleurs différentes, comme des équipes de foot... Il s’agit d’une dérive de la culture hooligan s’apparentant plus à des combats de free fight collectif qu’ à autre chose.
Il peut paraître étonnant de parler de « culture » pour parler du mouvement hooligan, mais elle existe. La culture hooligan, et le mode de vie qui s’y associe, est née en parallèle du mouvement skinhead [4] dans l’Angleterre de la fin des années soixante. Le football revêt une importance culturelle et sociale outre-manche sans commune mesure avec la France [5]. Dès lors, dans l’Angleterre de Margaret Thatcher, les frustrations sociales et les rivalités de territoire entre bandes (skinheads, rudeboys, rockers ou bikers) vont vite trouver un exutoire dans les stades et leurs alentours. La culture hooligan, notamment vestimentaire, puise dans la culture skinhead à travers les marques Lonsdale et Fred Perry. Elle a également construit ses propres codes vestimentaires et produit un nouveau surnom pour les hooligans : « casuals ». Le look « casual » est plus discret que le look skinhead, et il est né de la volonté, pour les plus irréductibles des stades, de passer inaperçu aux yeux des flics... et de pouvoir se reconnaître entre eux, et avec leurs adversaires, en portant des marques comme Stone Island, Burberry, Adidas ou Lacoste. Du côté musical, on retrouve souvent l’héritage skinhead à travers différents groupes de Oi ! ou de punk, de reggae, de rocksteady et de ska. Changements culturels aidant, certains y ajoutent du rap ou différentes musiques électroniques.
Créé à Messimy (petit village de l’ouest lyonnais) en 1987 avec comme devise « Combattre et Vaincre » le groupe de supporters affiche clairement la couleur dès ses débuts, avec une première écharpe « faite maison » arborant une croix celtique.
Depuis la fin des années 90, le groupe travaille à sa dédiabolisation autant par choix stratégique que par obligation. En passant la barre des milles adhérents au début des années 2000 (le groupe n’était composé que de 400 membres environ en 1997) et sous la pression du club, les dirigeants des BG n’ont eu de cesse de tenir leurs troupes, surtout à Gerland, les « dérapages » arrivant plus ou moins régulièrement à l’extérieur.
En effet, malgré les efforts pour contrôler les fans les plus ouvertement racistes, le groupe reste animé par un esprit de « droite », a minima patriotique et parfois ouvertement nationaliste. Il joue avec l’ambiguïté d’une grande profusion de drapeaux français en tribune. Dans le monde des supporters ce n’est pas anodin, c’est un marqueur politique. Les gones s’en défendent évidemment, et il est vrai que le bleu et le rouge sont les couleurs du club, le blanc c’est esthétique comprenez-vous... Les Bad Gones sont aussi l’un des rares groupes de supporters à chanter La Marseillaise [7]. Principalement en Ligue des Champions, mais cela arrive aussi contre certaines équipes françaises et pas n’importe lesquelles en général, comme contre la Duchère en 32e de finale de Coupe de France en janvier dernier.
Les provocations à caractère raciste ou nationaliste s’étaient estompées depuis la saison 1997/1998 jusqu’en 2004-2005. Elles s’étaient faites plus rares, surtout à domicile. En revanche lors des déplacements, certains gones ont semblé se lâcher plus facilement : bras tendus à Auxerre lors de la saison 2004-2005, re-belotte à Clermont-Ferrand la même saison, provocations lors de la saison 2005-2006 à Grenoble en coupe de France, etc etc…
Un autre exemple, moins grave, mais tout aussi révélateur : la manière dont s’étaient démarqués les BG en 2002 lors de l’entre-deux tours des présidentielles, notamment lors de leur déplacement à Bordeaux avec une banderole « halte au gauchisme » du plus bel effet et une banderole pour le moins ambigü à domicile lors de la réception de Lens en championnat, la veille d’un certain 5 mai :
L’interprétation du slogan pouvait être celle-ci : Le Pen est seul contre tous, comme l’OL. Le lettrage « gothique » renforçant l’« ambiguïté » du message.
Les Bad Gones sont aujourd’hui le plus gros groupe de supporters de Lyon (plus de 2000 encartés) et ils entretiennent des relations plus que cordiales avec la direction du club. Toute mauvaise publicité mettrait à mal leur légitimité si durement acquise auprès de Jean-Michel Aulas ainsi que les avantages sur les abonnements conclus avec le club, ou le soutien logistique pour certains déplacements.
Et en terme de mauvaise publicité, le faux communiqué de soutien au supporter parisien mort suite à des affrontements entre membres de la tribune Auteuil et de la tribune Boulogne en mars 2010, fit l’effet d’une petite bombe. Signés par les Bad Gones et Lyon 1950, les deux clubs de supporters nièrent tout lien avec les auteurs. Objectivement, les deux groupes auraient eu beaucoup trop à perdre en s’associant à une telle logorrhée raciste, et ils n’ont certainement pas participé à sa rédaction. Pour autant il est révélateur de la mentalité que peuvent prêter certains fans lyonnais (comme les rédacteurs de ce communiqué) aux groupes de supporters de Gerland.
Et si jamais c’était pas assez explicite ...
Par ailleurs, Jean-Yves un supporter membre des Lugdu mort dans un accident de voiture lors d’un déplacement à Nantes en avril 2005 était proche du groupuscule Action Nation aujourd’hui disparu. AN étant à l’époque une « sous-boutique » de Grégory Gennaro, militant et responsable du Front National sur Lyon et dans le sud de la France. Il lui avait rendu à l’époque hommage sur le forum de son groupuscule, tandis que lors du match PSG-OL le 17 avril 2005 les joueurs du club déposaient une gerbe de fleurs en son honneur aux pieds de la tribune.
Il est intéressant de noté également que les Lugdu étaient jumelés avec les supporters italiens de Côme, connus pour leur état d’esprit très à droite.
À la fin de la saison 2006-2007 les Nucleo et les Lugdu décidèrent de fusionner et de former le groupe Cosa Nostra Lyon.
Il semblerait que l’influence montante de la mouvance identitaire au sein du virage sud ces dernières années, auprès de la CNL ou des indépendants du virage sud, ait contribué à développer des tensions internes comme à favoriser certains incidents ayant servis d’arguments aux autorités pour dissoudre le groupe : dégradation de l’aire de repos de Beaune-Mercueil et attaque d’un car de supporters niçois, plusieurs membres du groupe interdits de stade, participation de plusieurs membres à un déplacement en cars vers Saint-Etienne en novembre 2009, organisé par les indeps, et à l’occasion duquel la police mis la main sur diverses armes et drogues...
Le groupe est très rapidement dans le colimateur du club, qui en fin de saison 2007/2008, avant même la dissolution, lui interdit de mettre la « bâche » officielle en bas de tribune, la faute au nom du groupe reprenant l’un des noms de la mafia sicilienne. La Cosa se contente alors d’exister officiellement uniquement en déplacement. La fin de la Cosa est allée de paire avec le désinvestissement de certains anciens du virage (ex-Nucleo ou Lugdu), échaudés par les tensions [9] et les problèmes qu’accumulaient la CNL.
La dissolution effective d’avril 2010 ne concerna en un sens qu’un noyau dur de 40 irréductibles (payant un peu les pots cassés pour d’autres) pour un groupe ayant accueilli jusqu’à plus de 500 membres au meilleur de sa forme. Commençant à prendre le relais de la Cosa Nostra, le groupe Lyon 1950 apparait dès 2009 tout en ayant une existence chaotique à Gerland avant de devenir le 4e groupe officiel de la Curva Sud (le virage Sud) à la reprise du championnat courant août 2010.
Comme l’analysent eux-même les leaders de Lyon 1950, la tribune sud n’est pas une tribune comme les autres, puisqu’elle accueille les supporters visiteurs. Elle est aussi la tribune de « résidence » des indépendants et des hooligans. Cette proximité favorise une certaine porosité avec les indépendants dont nous parlerons plus loin.
Lyon 1950, ce dernier-né des groupes de supporters de l’OL se retrouve pointé du doigt ces dernières semaines pour des actions racistes ou violentes de la part de certains de ses membres ou sympathisants. En cause notamment les échauffourées lors des matchs aller et retour contre Montpellier.
Sur le forum officiel du club, OLweb, le compte « bureau 1950 » représentant officiellement le groupe de supporters, n’y va pas par quatre chemins dans un message publié le 6 février dernier : l’avenir du groupe est en jeu. Affichant une volonté de transparence et de refus que leur groupe soit utilisé par certains comme vitrine politique, les dirigeants insistent et disent travailler depuis plusieurs mois à « dépolitiser » la tribune. Effectivement, des affiches et des flyers demandant aux membres du groupe et sympathisants de bannir tout affichage idéologique et toute provocation dans la parcage ont été diffusés durant l’automne 2011.
Mais tous les leaders de la tribune ont-ils toujours tiré dans le même sens ? Les leaders du virage et de Lyon 1950 semblent en effet entretenir des relations contradictoires avec certains groupuscules fascistes locaux et notamment avec les identitaires. Par exemple, en décembre 2010, l’un des leaders du groupe invitait les membres de Lyon 1950 à participer à la manifestation Lugdunum Suum organisée par les identitaires. Il précisait également que des drapeaux lyonnais étaient disponibles à la vente pour les membres du groupe, auprès d’un surnommé « Robloch »... « Robloch » n’étant autre que Pierre Robesson, secrétaire dans les statuts associatifs du local « La Traboule » (local des identitaires lyonnais) et organisateur du rassemblement identitaire du 14 mai 2011. Cinq mois plus tard, changement de discours des leaders : interdiction pour les membres du groupe d’afficher une quelconque appartenance à Lyon 1950 pour ceux qui se rendraient au « rassemblement pour la liberté » des identitaires le 14 mai.
Le virage sud est devenu depuis 6 ans environs le principal refuge pour les plus nationalistes des supporters de l’OL. Sans cynisme, il semble que la situation dont héritent aujourd’hui les responsables de Lyon 1950 est le fruit de mauvaises graines qui ont été pendant trop longtemps tolérées dans cette tribune. Comme dit l’adage, on ne récolte que ce que l’on sème.
Le groupe est aujourd’hui à la croisée des chemins : faire un véritable « ménage » ou être dissous et disparaitre si les « dérapages » persistent. Il ne sera pas aisé de couper les ponts avec les apprentis nationalistes les plus excités, mais croire que les intégrer au groupe en leur donnant des responsabilités (comme le mégaphone parfois...) les fera évoluer peut sembler un peu naïf. Pour autant, il n’y a que les « autorités » pour croire que la dissolution d’un groupe règle le problème. Pour cela il suffit d’un constat : la Cosa Nostra a été dissoute pour des raisons proches de celles qui menacent aujourd’hui Lyon 1950, preuve qu’aucun travail de fond n’a été mené, ni par le club, ni par les supporters eux-mêmes... La charte signée avec la LICRA n’y changera rien tout comme les éventuelles interdictions de stade qui pourraient être prononcées.
Estimés par la police à une cinquantaine, le noyau dur est constitué d’une quarantaine de membres, certains réunis en firm [10]. Ils n’ont pas tous d’orientation politique précise, certains sont de gauches, d’autres plus à droite et d’autres apolitiques. La tolérance des uns envers les autres reposent sur la légitimité acquise dans les affrontements avec les indeps, hools ou ultras adverses. Autour de ce noyau dur gravite différents individus et petits groupes ayant une double appartenance : supporters et militants nationalistes.
L’implication de ces derniers dans la vie du mouvement indépendant lyonnais (et dans les différents groupes de supporters) est relativement marginale, hormis certaines exceptions. Ils sont surtout présents à Gerland ou en déplacement quand l’OL rencontre des équipes dont ils haïssent les supporters, souvent parce qu’ils sont ouvertement antiracistes : Saint-Etienne (Green Angels), Bordeaux (Les principaux groupes ultras se revendiquant de gauche et/ou antiracistes), Marseille (Idem) ou Montpellier (parce qu’antiracistes mais avant tout parce que les ultras viennent pour une bonne partie du quartier populaire de La Paillade).
Les apprentis fascistes qui gravitent dans les tribunes lyonnaises travaillent depuis plusieurs années à amener un maximum de fans vers les groupuscules politiques locaux, en ayant une prédilection pour les hooligans, qui potentiellement font un bon service d’ordre, ou une bonne force de frappe pour une action coup de poing. Dans les années 90, le FNJ et l’UDEL [11] s’y sont essayés. Depuis le début des années 2000, ce sont surtout les identitaires qui mènent ce travail de drague.
Les identitaires entrainèrent ainsi en janvier 2010 quelques hools dans l’attaque du rassemblement contre Éric Besson lors d’un débat organisé à la préfecture de Lyon sur l’identité nationale. Plus récemment cette influence s’exprima à nouveau lors de l’attaque du concert de Sniper en décembre 2011.
Attirant donc à eux une partie des indeps et hools, les néo-nazis prirent une certaine influence au stade, aidés par quelques individus, souvent jeunes, faisant « courroie de transmission ». Cette influence se concrétisa par un événement coorganisé par l’équipe de Lyon Dissident et l’un des leaders des indeps du virage sud.
Dans un contexte de violences portées par différentes bandes ou groupuscules fascisants, certains hools lyonnais se sont affichés publiquement à plusieurs occasions aux côtés de militants nationalistes. Ce fut le cas notamment le 10 avril 2010, lorsqu’ils se regroupèrent au bar le Wallace pour provoquer la manifestation antifasciste ayant lieu ce jour là.
L’autre sortie publique remarquée eu lieu en octobre 2010 durant le mouvement social contre le projet de réforme des retraites. Initiative au départ plus chauvine et cocardière que réellement fasciste, ce rassemblement de près de 200 personnes venues pour en découdre en centre-ville avec les « casseurs », fût piloté en sous-main par des membres de Lyon Dissident (dont les anciens membres du bureau de l’association Rock ’n’ Gones, Renaud Mannheim, Pierre Scarano et José Magalhaes [15] ) bien aidés par certains jeunes apprentis hooligans gravitant à la fois autour du Bunker Korps et des identitaires (par exemple le surnommé « Willo », sur lequel nous reviendrons plus loin).
Une bonne partie de ces jeunes se sont retrouvés en septembre 2011 au pied de la Basilique de Fourvière pour une « manifestation » : Le Hard Bass Lyon qui traversa toute la ville, en prenant le métro, pour finir où ils ont l’habitude d’aller, au Ninkasi Gerland. Tout ça sans rencontrer un flic, ni même un contrôle TCL ! Comme quoi la vidéo-surveillance... L’idée lancée par des jeunes des virages nord et sud a rassemblé des supporters issus de tous les groupes (environ 80 participants) : Bad Gones, Lyon 1950 et indeps. Ce happening est dans la ligne d’une mode lancée par le milieu hooligan et nationaliste de pays d’Europe de l’Est comme la Pologne et la Russie. Le principe est simple : faire irruption en groupe dans n’importe quel lieu public, masqué (ou non), en gigotant sur une musique électronique proche du « jump style ».
Elle a fait parlé d’elle très récemment dans la rubrique des faits divers : 6 de ses membres ont été interpellés suite à des dégradations sur des véhicules de membres des Magic Fans (groupe de supporters stéphanois installé au virage nord du stade Geoffroy-Guichard, à St-Etienne) et des tags nazis.
Août 2010, match d’avant-saison de l’OL sans aucun enjeu sportif à Tignes contre le Servette de Genève. L’occasion rêvée pour quelques apprentis nazis de faire parler d’eux. Derrière la croix celtique, on retrouve un jeune de 22 ans : N. André surnommé « Willo » (avec la casquette à l’envers et la bière à la main sur la photo ci-dessus).
En décembre 2010 il fût l’un des combattants (catégorie moins de 70 kg ; 58 kg) du tournois de Mixed Martial Art (MMA - free fight) organisé par la Vlaams Huis lilloise qui a elle aussi intégré 3e Voie après avoir fait partie de l’alliance les réunissant avec Lyon Dissident et Le Local de Serge Ayoub. Il est à la fois proche des anciens de Lyon Dissident et des identitaires. Il a d’ailleurs donné plusieurs coups de main à Solidarité Kosovo notamment en juillet 2011 pour le chargement d’un convois de matelas.
C’est à ce titre de « leader » d’une mouvance fantomatique qu’il est convié aux réunions de coordination des groupes nationalistes les plus radicaux, l’Unité Gauloise (regroupant le GUD Lyon, les Jeunesses Nationalistes et 3e Voie Lyon (ex-Lyon Dissident)).
Il a tout à fait le profil du jeune activiste nationaliste décrit plus haut ; hyper-actif, présents partout et gravitant autour de tous les groupuscules possibles.
**Article 31 - Information et analyse sur les droites radicales et nationalistes lyonnaises.
Source : Rebellyon.info
Après une brève présentation de la culture du stade, plus précisément celle des supporters des tribunes populaires, on fera donc un inventaire des groupes de supporters lyonnais les plus importants, du plus ancien groupe au plus récent, en montrant leurs relations ou non avec les milieux nationalistes et leurs idées, ainsi que leur évolution. Afin qu’au-delà des amalgames et des préjugés souvent colportés au sujet des supporters lyonnais, devant une réalité changeante et variée, la critique, plus précise, se fasse plus incisive.
Sommaire :
Introduction : cultures de tribune : « ultras » et « hooligans »
Kop Virage Nord et Bad Gones 87
Lugdunum’s 93 (1993-2007, virage sud)
Nucleo Ultra (2000-2007, virage sud)
Cosa Nostra Lyon (2007-2010, virage sud)
Lyon 1950 (2010, virage sud)
Supporters indépendants et Hooligans
Rubrique des méfaits divers
mise à jour 16/03/2012 : À lire sur le même sujet sur Rue89 : Retour du racisme dans les tribunes de foot : le cas de Lyon.
mise à jour 23/03/2012 : pour le dernier épisode en date, lire : OL : derrière les supporters nazis, les identitaires de ’Rebeyne’
Cultures de tribune : « ultras » et « hooligans »
On ne peut faire un article sur le monde des tribunes sans rendre compte, de manière rapide, de quel univers on parle. La caricature simpliste du supporter de foot aviné, beauf, en bref bas du front, ne permet pas de comprendre la sous-culture [1] qui existe dans les tribunes populaires. C’est un monde fait de codes, de valeurs, avec son propre langage et ses propres normes. Il existe deux « mentalités » : l’une italienne (ou latine) et l’autre anglaise.La mentalité dite « latine » désigne ce que l’on appelle les « ultras ». Elle est née en Italie à la fin des années 60. Les ultras sont des supporters qui choisissent d’encourager leur équipe en se regroupant sous forme d’associations. Ils se trouvent le plus souvent dans les virages des stades (les tribunes situées derrière les buts) traditionnellement désignés comme les tribunes populaires (le prix d’une place y est généralement inférieur aux places des tribunes latérales). Leur soutien est actif, axé autour de l’animation des tribunes, et de la défense symbolique ou non, de celles-ci face aux supporters adverses. Les ultras animent leurs tribunes dans le but d’en faire un spectacle, qu’on appelle un « tifo » [2] : Ils utilisent pour cela des « calicos » [3], drapeaux et tout un tas d’artifices dont des fumigènes (qui sont interdits et qui entraînent régulièrement répression policière et judiciaire).
Les ultras mettent un point d’honneur à prouver leur fidélité, en ne manquant aucun déplacement, en chantant et soutenant leur équipe même quand elle perd (et tant qu’ils jugent qu’elle fait preuve des même valeur qu’eux : de courage et de volonté), les supporters prouvent qu’ils sont des ultras, des fanatiques, des irréductibles... C’est ce qui les différencie des supporters classiques, partant avant la fin du match préférant éviter 30 min de bouchons que de suivre leur équipe jusqu’au bout.
Tous les « supportérismes » n’ont d’ailleurs pas le même impact. Le public assis sagement à Lyon dans les tribunes de Jean-Jaurès et de Jean Bouin (venu consommer un spectacle plus que supporter une équipe, d’une certaine manière) n’a pas le même profil que celui que l’on retrouve dans les virages nord et sud. Il n’a pas le même engagement vis à vis du club et de l’équipe. Pas la même passion, ni la même ferveur. Pour les ultras, supporter une équipe est un engament, comme une forme de militantisme.
La mentalité « anglaise » repose avant tout sur les chants tout du long de la rencontre, et va de paire avec une volonté de prendre le dessus sur les supporters adverses, y compris physiquement quand le contexte le permet. Ces supporters sont des « fans ». Ils sont parfois eux aussi regroupés en associations de supporters. Cette mentalité de « fans » désigne également les supporters dits « indépendants ». Ces supporters n’appartiennent à aucun groupe officiel, ils ne sont pas « cartés ». On appelle les plus « durs » d’entre eux les hooligans.
Pour les hooligans il y a deux championnats : celui des équipes de football et le leur, par affrontements entre groupes de supporters. Dans une société où la violence est bannie, et celle de l’état et de ses forces de l’ordre la seule qui soit considérée comme légitime, les affrontements entre supporters sont vus comme une dégénérescence du sport moderne. Pour autant, ces affrontements répondent à des règles, et malgré les accidents qui peuvent arriver parfois le but des combattants n’est pas de « tuer » l’adversaire, mais tout simplement de prendre le dessus et de le contraindre à la fuite.
La pacification à l’intérieur des stades et en dehors ainsi que la répression du mouvement ultra les conduisent à organiser et prévoir leurs affrontements. Les rendez-vous se prennent de leader à leader, pour convenir d’un endroit, d’une heure et du nombre de participants de chaque côté. Chose marquante, une règle prévaut pour tous : pas d’armes. Règle semble-t-il peu respectée par les niçois ou montpelliérains par exemple, ce qui leur vaut une haine partagée à peu près par tous les supporters d’hexagone. Les hooligans, les vrais, s’affrontent entre eux, et ne s’en prennent pas au premier porteur d’écharpe adverse venu. La plupart du temps les affrontements se déroulent dans les jours qui précèdent ou suivent le match. Mais une nouvelle mode, venue d’Europe de l’Est, pousse certains hooligans à organiser des « tapes » à 40 contre 40 perdus au font d’un bois, en dehors de toute confrontation footballistique. Chaque groupe se reconnaissant par des tenues de couleurs différentes, comme des équipes de foot... Il s’agit d’une dérive de la culture hooligan s’apparentant plus à des combats de free fight collectif qu’ à autre chose.
Il peut paraître étonnant de parler de « culture » pour parler du mouvement hooligan, mais elle existe. La culture hooligan, et le mode de vie qui s’y associe, est née en parallèle du mouvement skinhead [4] dans l’Angleterre de la fin des années soixante. Le football revêt une importance culturelle et sociale outre-manche sans commune mesure avec la France [5]. Dès lors, dans l’Angleterre de Margaret Thatcher, les frustrations sociales et les rivalités de territoire entre bandes (skinheads, rudeboys, rockers ou bikers) vont vite trouver un exutoire dans les stades et leurs alentours. La culture hooligan, notamment vestimentaire, puise dans la culture skinhead à travers les marques Lonsdale et Fred Perry. Elle a également construit ses propres codes vestimentaires et produit un nouveau surnom pour les hooligans : « casuals ». Le look « casual » est plus discret que le look skinhead, et il est né de la volonté, pour les plus irréductibles des stades, de passer inaperçu aux yeux des flics... et de pouvoir se reconnaître entre eux, et avec leurs adversaires, en portant des marques comme Stone Island, Burberry, Adidas ou Lacoste. Du côté musical, on retrouve souvent l’héritage skinhead à travers différents groupes de Oi ! ou de punk, de reggae, de rocksteady et de ska. Changements culturels aidant, certains y ajoutent du rap ou différentes musiques électroniques.
- Zulus Army - Birmingham Zulu Warriors. La firm black, blanc et bleu (couleur du club).
- 1950 : Naissance de l’Olympique Lyonnais.
Bad Gones 87, Kop Virage Nord
Les Bad Gones traînent depuis leurs débuts une mauvaise réputation dans le monde des tribunes, celle d’un groupe de fachos. Les clubs de supporters ouvertement antiracistes et parfois clairement de gauche ne manquent pas une occasion de les pointer du doigt comme la peste brune des stades au même titre que les membres du KOB parisien, les niçois ou les lillois. Mais d’où leur vient cette si fâcheuse réputation ?Créé à Messimy (petit village de l’ouest lyonnais) en 1987 avec comme devise « Combattre et Vaincre » le groupe de supporters affiche clairement la couleur dès ses débuts, avec une première écharpe « faite maison » arborant une croix celtique.
- On notera la deuxième devise inscrite sur l’écharpe : « notre honneur s’appelle fidélité », devise SS.
Depuis la fin des années 90, le groupe travaille à sa dédiabolisation autant par choix stratégique que par obligation. En passant la barre des milles adhérents au début des années 2000 (le groupe n’était composé que de 400 membres environ en 1997) et sous la pression du club, les dirigeants des BG n’ont eu de cesse de tenir leurs troupes, surtout à Gerland, les « dérapages » arrivant plus ou moins régulièrement à l’extérieur.
En effet, malgré les efforts pour contrôler les fans les plus ouvertement racistes, le groupe reste animé par un esprit de « droite », a minima patriotique et parfois ouvertement nationaliste. Il joue avec l’ambiguïté d’une grande profusion de drapeaux français en tribune. Dans le monde des supporters ce n’est pas anodin, c’est un marqueur politique. Les gones s’en défendent évidemment, et il est vrai que le bleu et le rouge sont les couleurs du club, le blanc c’est esthétique comprenez-vous... Les Bad Gones sont aussi l’un des rares groupes de supporters à chanter La Marseillaise [7]. Principalement en Ligue des Champions, mais cela arrive aussi contre certaines équipes françaises et pas n’importe lesquelles en général, comme contre la Duchère en 32e de finale de Coupe de France en janvier dernier.
Les provocations à caractère raciste ou nationaliste s’étaient estompées depuis la saison 1997/1998 jusqu’en 2004-2005. Elles s’étaient faites plus rares, surtout à domicile. En revanche lors des déplacements, certains gones ont semblé se lâcher plus facilement : bras tendus à Auxerre lors de la saison 2004-2005, re-belotte à Clermont-Ferrand la même saison, provocations lors de la saison 2005-2006 à Grenoble en coupe de France, etc etc…
Un autre exemple, moins grave, mais tout aussi révélateur : la manière dont s’étaient démarqués les BG en 2002 lors de l’entre-deux tours des présidentielles, notamment lors de leur déplacement à Bordeaux avec une banderole « halte au gauchisme » du plus bel effet et une banderole pour le moins ambigü à domicile lors de la réception de Lens en championnat, la veille d’un certain 5 mai :
L’interprétation du slogan pouvait être celle-ci : Le Pen est seul contre tous, comme l’OL. Le lettrage « gothique » renforçant l’« ambiguïté » du message.
Les Bad Gones sont aujourd’hui le plus gros groupe de supporters de Lyon (plus de 2000 encartés) et ils entretiennent des relations plus que cordiales avec la direction du club. Toute mauvaise publicité mettrait à mal leur légitimité si durement acquise auprès de Jean-Michel Aulas ainsi que les avantages sur les abonnements conclus avec le club, ou le soutien logistique pour certains déplacements.
Et en terme de mauvaise publicité, le faux communiqué de soutien au supporter parisien mort suite à des affrontements entre membres de la tribune Auteuil et de la tribune Boulogne en mars 2010, fit l’effet d’une petite bombe. Signés par les Bad Gones et Lyon 1950, les deux clubs de supporters nièrent tout lien avec les auteurs. Objectivement, les deux groupes auraient eu beaucoup trop à perdre en s’associant à une telle logorrhée raciste, et ils n’ont certainement pas participé à sa rédaction. Pour autant il est révélateur de la mentalité que peuvent prêter certains fans lyonnais (comme les rédacteurs de ce communiqué) aux groupes de supporters de Gerland.
Et si jamais c’était pas assez explicite ...
Lugdunum’s 93 (1993-2007, virage sud)
Par ailleurs, Jean-Yves un supporter membre des Lugdu mort dans un accident de voiture lors d’un déplacement à Nantes en avril 2005 était proche du groupuscule Action Nation aujourd’hui disparu. AN étant à l’époque une « sous-boutique » de Grégory Gennaro, militant et responsable du Front National sur Lyon et dans le sud de la France. Il lui avait rendu à l’époque hommage sur le forum de son groupuscule, tandis que lors du match PSG-OL le 17 avril 2005 les joueurs du club déposaient une gerbe de fleurs en son honneur aux pieds de la tribune.
Il est intéressant de noté également que les Lugdu étaient jumelés avec les supporters italiens de Côme, connus pour leur état d’esprit très à droite.
Nucleo Ultra (2000-2007, virage sud)
À la fin de la saison 2006-2007 les Nucleo et les Lugdu décidèrent de fusionner et de former le groupe Cosa Nostra Lyon.
Cosa Nostra Lyon (2007-2010, virage sud)
La Cosa Nostra Lyon (CNL) est donc née en juin 2007 du regroupement des deux groupes de supporters Lugdunum’s et Nucleo Ultra. Pas forcément du goût de tous parmi les anciens des groupes disparus, la volonté était d’unifier la tribune derrière une seule « bâche » et d’additionner les énergies. Le groupe vivra 3 ans avant d’être dissout par décret du ministère de l’intérieur le 28 avril 2010.Il semblerait que l’influence montante de la mouvance identitaire au sein du virage sud ces dernières années, auprès de la CNL ou des indépendants du virage sud, ait contribué à développer des tensions internes comme à favoriser certains incidents ayant servis d’arguments aux autorités pour dissoudre le groupe : dégradation de l’aire de repos de Beaune-Mercueil et attaque d’un car de supporters niçois, plusieurs membres du groupe interdits de stade, participation de plusieurs membres à un déplacement en cars vers Saint-Etienne en novembre 2009, organisé par les indeps, et à l’occasion duquel la police mis la main sur diverses armes et drogues...
Le groupe est très rapidement dans le colimateur du club, qui en fin de saison 2007/2008, avant même la dissolution, lui interdit de mettre la « bâche » officielle en bas de tribune, la faute au nom du groupe reprenant l’un des noms de la mafia sicilienne. La Cosa se contente alors d’exister officiellement uniquement en déplacement. La fin de la Cosa est allée de paire avec le désinvestissement de certains anciens du virage (ex-Nucleo ou Lugdu), échaudés par les tensions [9] et les problèmes qu’accumulaient la CNL.
La dissolution effective d’avril 2010 ne concerna en un sens qu’un noyau dur de 40 irréductibles (payant un peu les pots cassés pour d’autres) pour un groupe ayant accueilli jusqu’à plus de 500 membres au meilleur de sa forme. Commençant à prendre le relais de la Cosa Nostra, le groupe Lyon 1950 apparait dès 2009 tout en ayant une existence chaotique à Gerland avant de devenir le 4e groupe officiel de la Curva Sud (le virage Sud) à la reprise du championnat courant août 2010.
Lyon 1950 (depuis 2010, virage sud)
Le groupe est créé durant la saison 2009/2010 par des « historiques » de la tribune sud jusque-là non impliqués dans les groupes de supporters ayant existé. Les fondateurs avaient au départ pour objectif de monter un groupe de « fans » plus qu’ « ultras », c’est-à-dire moins de tifos et plus de chants. L’arrivée de jeunes en provenance du virage nord avec une mentalité « ultras », changera quelque peu la donne. Ils auraient pour certains rejoint la tribune sud pour y exprimer plus facilement certaines de leurs convictions. La faute à la réputation du virage d’être lié aux hooligans et à certains mouvements nationalistes.Comme l’analysent eux-même les leaders de Lyon 1950, la tribune sud n’est pas une tribune comme les autres, puisqu’elle accueille les supporters visiteurs. Elle est aussi la tribune de « résidence » des indépendants et des hooligans. Cette proximité favorise une certaine porosité avec les indépendants dont nous parlerons plus loin.
Lyon 1950, ce dernier-né des groupes de supporters de l’OL se retrouve pointé du doigt ces dernières semaines pour des actions racistes ou violentes de la part de certains de ses membres ou sympathisants. En cause notamment les échauffourées lors des matchs aller et retour contre Montpellier.
Sur le forum officiel du club, OLweb, le compte « bureau 1950 » représentant officiellement le groupe de supporters, n’y va pas par quatre chemins dans un message publié le 6 février dernier : l’avenir du groupe est en jeu. Affichant une volonté de transparence et de refus que leur groupe soit utilisé par certains comme vitrine politique, les dirigeants insistent et disent travailler depuis plusieurs mois à « dépolitiser » la tribune. Effectivement, des affiches et des flyers demandant aux membres du groupe et sympathisants de bannir tout affichage idéologique et toute provocation dans la parcage ont été diffusés durant l’automne 2011.
Mais tous les leaders de la tribune ont-ils toujours tiré dans le même sens ? Les leaders du virage et de Lyon 1950 semblent en effet entretenir des relations contradictoires avec certains groupuscules fascistes locaux et notamment avec les identitaires. Par exemple, en décembre 2010, l’un des leaders du groupe invitait les membres de Lyon 1950 à participer à la manifestation Lugdunum Suum organisée par les identitaires. Il précisait également que des drapeaux lyonnais étaient disponibles à la vente pour les membres du groupe, auprès d’un surnommé « Robloch »... « Robloch » n’étant autre que Pierre Robesson, secrétaire dans les statuts associatifs du local « La Traboule » (local des identitaires lyonnais) et organisateur du rassemblement identitaire du 14 mai 2011. Cinq mois plus tard, changement de discours des leaders : interdiction pour les membres du groupe d’afficher une quelconque appartenance à Lyon 1950 pour ceux qui se rendraient au « rassemblement pour la liberté » des identitaires le 14 mai.
- Mai 2011 : Rassemblement anti-puel organisé par Lyon 1950. On y retrouve plusieurs individus connus des milieux fascistes lyonnais, dont un participant avec un t-shirt du groupe néo-nazi belge « Les Vilains » (tout à droite sur la photo).
Le virage sud est devenu depuis 6 ans environs le principal refuge pour les plus nationalistes des supporters de l’OL. Sans cynisme, il semble que la situation dont héritent aujourd’hui les responsables de Lyon 1950 est le fruit de mauvaises graines qui ont été pendant trop longtemps tolérées dans cette tribune. Comme dit l’adage, on ne récolte que ce que l’on sème.
Le groupe est aujourd’hui à la croisée des chemins : faire un véritable « ménage » ou être dissous et disparaitre si les « dérapages » persistent. Il ne sera pas aisé de couper les ponts avec les apprentis nationalistes les plus excités, mais croire que les intégrer au groupe en leur donnant des responsabilités (comme le mégaphone parfois...) les fera évoluer peut sembler un peu naïf. Pour autant, il n’y a que les « autorités » pour croire que la dissolution d’un groupe règle le problème. Pour cela il suffit d’un constat : la Cosa Nostra a été dissoute pour des raisons proches de celles qui menacent aujourd’hui Lyon 1950, preuve qu’aucun travail de fond n’a été mené, ni par le club, ni par les supporters eux-mêmes... La charte signée avec la LICRA n’y changera rien tout comme les éventuelles interdictions de stade qui pourraient être prononcées.
- Une vue imprennable sur Gerland ...
Supporters indépendants et hooligans
C’est parmi les supporters indépendants que l’on retrouve le plus souvent les hooligans. Mais rien n’est figé, et il existe une certaine porosité entre groupes ultras et milieu indépendant/hooligan. Il n’est pas rare de voir des membres de groupes de supporters ultras partir en déplacement avec les indeps. Cette porosité tien au fait que les indépendants partagent la tribune à Gerland avec des groupes constitués et officiels. Ils sont surtout présents au virage sud mais quelques uns résident également au virage nord.Estimés par la police à une cinquantaine, le noyau dur est constitué d’une quarantaine de membres, certains réunis en firm [10]. Ils n’ont pas tous d’orientation politique précise, certains sont de gauches, d’autres plus à droite et d’autres apolitiques. La tolérance des uns envers les autres reposent sur la légitimité acquise dans les affrontements avec les indeps, hools ou ultras adverses. Autour de ce noyau dur gravite différents individus et petits groupes ayant une double appartenance : supporters et militants nationalistes.
L’implication de ces derniers dans la vie du mouvement indépendant lyonnais (et dans les différents groupes de supporters) est relativement marginale, hormis certaines exceptions. Ils sont surtout présents à Gerland ou en déplacement quand l’OL rencontre des équipes dont ils haïssent les supporters, souvent parce qu’ils sont ouvertement antiracistes : Saint-Etienne (Green Angels), Bordeaux (Les principaux groupes ultras se revendiquant de gauche et/ou antiracistes), Marseille (Idem) ou Montpellier (parce qu’antiracistes mais avant tout parce que les ultras viennent pour une bonne partie du quartier populaire de La Paillade).
Les apprentis fascistes qui gravitent dans les tribunes lyonnaises travaillent depuis plusieurs années à amener un maximum de fans vers les groupuscules politiques locaux, en ayant une prédilection pour les hooligans, qui potentiellement font un bon service d’ordre, ou une bonne force de frappe pour une action coup de poing. Dans les années 90, le FNJ et l’UDEL [11] s’y sont essayés. Depuis le début des années 2000, ce sont surtout les identitaires qui mènent ce travail de drague.
- L’une des rares apparition publique en tribune des indépendants, menée par les identitaires. Mars 2008, match Lyon-Bordeaux.
Les identitaires entrainèrent ainsi en janvier 2010 quelques hools dans l’attaque du rassemblement contre Éric Besson lors d’un débat organisé à la préfecture de Lyon sur l’identité nationale. Plus récemment cette influence s’exprima à nouveau lors de l’attaque du concert de Sniper en décembre 2011.
- Autocollants produits par des membres de la Section Saint-Jean, jeunes néo-nazis tournant au départ autour des identitaires et se rapprochant par la suite de Lyon Dissident.
Attirant donc à eux une partie des indeps et hools, les néo-nazis prirent une certaine influence au stade, aidés par quelques individus, souvent jeunes, faisant « courroie de transmission ». Cette influence se concrétisa par un événement coorganisé par l’équipe de Lyon Dissident et l’un des leaders des indeps du virage sud.
Dans un contexte de violences portées par différentes bandes ou groupuscules fascisants, certains hools lyonnais se sont affichés publiquement à plusieurs occasions aux côtés de militants nationalistes. Ce fut le cas notamment le 10 avril 2010, lorsqu’ils se regroupèrent au bar le Wallace pour provoquer la manifestation antifasciste ayant lieu ce jour là.
L’autre sortie publique remarquée eu lieu en octobre 2010 durant le mouvement social contre le projet de réforme des retraites. Initiative au départ plus chauvine et cocardière que réellement fasciste, ce rassemblement de près de 200 personnes venues pour en découdre en centre-ville avec les « casseurs », fût piloté en sous-main par des membres de Lyon Dissident (dont les anciens membres du bureau de l’association Rock ’n’ Gones, Renaud Mannheim, Pierre Scarano et José Magalhaes [15] ) bien aidés par certains jeunes apprentis hooligans gravitant à la fois autour du Bunker Korps et des identitaires (par exemple le surnommé « Willo », sur lequel nous reviendrons plus loin).
Une bonne partie de ces jeunes se sont retrouvés en septembre 2011 au pied de la Basilique de Fourvière pour une « manifestation » : Le Hard Bass Lyon qui traversa toute la ville, en prenant le métro, pour finir où ils ont l’habitude d’aller, au Ninkasi Gerland. Tout ça sans rencontrer un flic, ni même un contrôle TCL ! Comme quoi la vidéo-surveillance... L’idée lancée par des jeunes des virages nord et sud a rassemblé des supporters issus de tous les groupes (environ 80 participants) : Bad Gones, Lyon 1950 et indeps. Ce happening est dans la ligne d’une mode lancée par le milieu hooligan et nationaliste de pays d’Europe de l’Est comme la Pologne et la Russie. Le principe est simple : faire irruption en groupe dans n’importe quel lieu public, masqué (ou non), en gigotant sur une musique électronique proche du « jump style ».
- C’est les Anonymous qui doivent être contents...
Rubrique des méfaits divers
La Mezza Lyon (virage sud) est une firm d’une quinzaine de membres qui existe depuis environ quatre ans et s’est toujours affirmée comme fasciste.Elle a fait parlé d’elle très récemment dans la rubrique des faits divers : 6 de ses membres ont été interpellés suite à des dégradations sur des véhicules de membres des Magic Fans (groupe de supporters stéphanois installé au virage nord du stade Geoffroy-Guichard, à St-Etienne) et des tags nazis.
Août 2010, match d’avant-saison de l’OL sans aucun enjeu sportif à Tignes contre le Servette de Genève. L’occasion rêvée pour quelques apprentis nazis de faire parler d’eux. Derrière la croix celtique, on retrouve un jeune de 22 ans : N. André surnommé « Willo » (avec la casquette à l’envers et la bière à la main sur la photo ci-dessus).
En décembre 2010 il fût l’un des combattants (catégorie moins de 70 kg ; 58 kg) du tournois de Mixed Martial Art (MMA - free fight) organisé par la Vlaams Huis lilloise qui a elle aussi intégré 3e Voie après avoir fait partie de l’alliance les réunissant avec Lyon Dissident et Le Local de Serge Ayoub. Il est à la fois proche des anciens de Lyon Dissident et des identitaires. Il a d’ailleurs donné plusieurs coups de main à Solidarité Kosovo notamment en juillet 2011 pour le chargement d’un convois de matelas.
- « Willo » en polo bleu ciel. Photo prise sur le site de Solidarité Kosovo.
C’est à ce titre de « leader » d’une mouvance fantomatique qu’il est convié aux réunions de coordination des groupes nationalistes les plus radicaux, l’Unité Gauloise (regroupant le GUD Lyon, les Jeunesses Nationalistes et 3e Voie Lyon (ex-Lyon Dissident)).
Il a tout à fait le profil du jeune activiste nationaliste décrit plus haut ; hyper-actif, présents partout et gravitant autour de tous les groupuscules possibles.
- 1987, les Bad Gones sont créés et Jean-Michel Aulas est nommé président du club. 1989 : l’OL retrouve la première division.
- A Genève, 31 Juillet 2011, match Lyon - Porto, saluts nazis de très jeunes supporters lyonnais dans les tribunes
**Article 31 - Information et analyse sur les droites radicales et nationalistes lyonnaises.
Source : Rebellyon.info
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